To Julie Carron-Ampère (1ère femme d'Ampère)   28 janvier 1803

[1118]Du Vendredi soir [28 janvier 1803]

Ma bonne amie, je t'écrirai une bien petite lettre parce que je travaille sans relâche à rédiger les deux pages qui doivent être changées dans mon ouvrage *. Je les ai déjà rédigées deux fois et je vais les récrire au moins encore une fois pour être sûr de n'y laisser aucune incorrection de style ou autre. J'y suis tout entier ; car je sens qu'imprimées à temps , elles m'assureront la protection de Laplace qui verra avec plaisir la déférence que j'aurai pour son jugement, et la promptitude avec laquelle j'aurai conformé mon ouvrage à son avis, tandis que, si cela n'était fait qu'après les nominations, je risquerais bien \fort/ que ma mésaventure me nuisît un[1119] peu.J'attends, avec une impatience qui n'a point d'expression, la réponse de MM. Périsse, dont je ne doute pourtant pas, car j'ai vu si souvent des cartons dans des livres de mathématiques ou autres, que je sais que cette opération n'est ni difficile, ni bien coûteuse et que, d'ailleurs, ma réputation et ma fortune y étant également intéressées, ils jugeront comme moi qu'il faut se presser le plus possible. Et il n'y a qu'eux qui puissent me rendre ce service à cause de M. Gérard qui a fait le reste et qui sait à présent comment l'on doit disposer les caractères algébriques[1120] de ces sortes de calculs. Comment te trouves-tu, ma bonne amie ? M. Gilibert t'a-t-il vue hier jeudi comme il me l'avait promis ? Te sens-tu mieux ou plus mal de suivre ses avis ? Qu'y a-t-il de nouveau à ton égard ou à celui du petit ? Que d'autres questions j'aurais à te faire ! Tu les devineras et tu me donneras tous les détails que tu sais que j'attends comme l'unique consolation que je puisse trouver à Bourg. On dit ici que les inspecteur[s] généraux y seront dema[in ;] mais c'est un bruit vague. Si la chose est vraie, je le saurai et je te l'écrirai. A présent, je vais retourner à mon travail habituel. Je te souhaite une bonne nuit ; dors bien, ma Julie ! Quand un mari[1121] est réduit à se servir de la poste pour porter des baisers à sa femme à douze lieues, elle n'a pas peur qu'il l'empêche de dormir !

Du samedi matin [29 janvier] L'arrivée de ces messieurs ne s'est pas confirmée. Je n'ai rien appris de nouveau, quelque soin que j'aie eu de m'en informer. Ce sera peutêtre pour ce soir ou pour demain. Je ferme ma lettre pour qu'elle ne manque pas le courrier. Les tiennes doivent se mettre à la poste les jours impairs : aujourd'hui, après-demain, etc. Je t'embrasse comme je t'aime !

À madame Ampère chez Mme Carron rue du griffon maison Simon, vis-à-vis la rue Terraille à Lyon.

Please cite as “L206,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 25 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L206