To Julie Carron-Ampère (1ère femme d'Ampère)   13 février 1803

[1386] Bourg le Dimanche 13 février 1803

J'ai écrit tout le jour des lettres, ma bonne amie. Outre les deux que tu trouveras dans celle-ci avec la lettre de maman que je veux que tu lises pour savoir si elle t'attendrira comme moi, j'ai fait une réponse à S[ain]tDidier qui m'avait écrit deux fois sans que je lui eusse répondu pour le remercier de s'être donné la peine de copier pour moi des extraits fort longs de la Bibliothèque britannique. De toutes les lettres que j'avais à faire, j'ai gardé pour la dernière celle où je savais que je trouverais un grand plaisir. Ma pauvre Julie, que tu es bonne de t'y prendre un jour d'avance pour pouvoir[1387] m'envoyer de longues lettres ! Tu sais bien que c'est tout mon bonheur quand je suis loin de toi. Mais je n'en voudrais plus si cela te fatiguait. Que je serais heureux si le premier germinal te guérissait réellement mieux que tous les remèdes !

Je t'enverrai les 7 l[ivre]s 15 s[ou]s dont tu me parles à la première, avec 16 l[ivre]s 10 s[ou]s dont je suis encore redevable à M. Gambier d'après sa facture et qui m'ont été remboursés. S'il les demandait, tu les lui remettrais ; autrement, je pense qu'autant vaut que j'attende d'aller à Lyon pour tout payer. J'ai déchiré la manche de mon gros habit gris et, si tu avais un morceau de ce drap, tu me ferais bien plaisir de le mettre dans la première lettre que tu m'enverras[1388] par Pochon.

Juge, ma bonne amie, comme j'ai été heureux de trouver un bon logement pour cet hiver ! J'ai été aujourd'hui dans ma chambre du collège et je l'ai vue toute pleine de neige ; le vent avait cassé la fenêtre cet automne , la bise l'a achevée et mes matelas, que j'avais mis crainte des rats au milieu de la chambre sur une table que M. Berger m'avait prêtée l'année passée, étaient couverts de trois doigts de neige. Mes papiers, mes livres étaient dans le même cas. J'ai secoué la neige et [j'ai] rangé de mon mieux ; j'espère que rien ne sera gâté.

Du mardi soir [15 février 1803] Je ne reçu qu'hier lundi à midi le paquet de Marsil contenant mon épreuve ; j'y ai travaillé[1389] depuis tous les moments que j'ai eus libres. J'ai veillé ce soir pour tout finir et je ne peux que te dire un petit adieu bien court, mais bien tendre. Le dégel complet me fait espérer que tu seras moins fatiguée que tu ne l'étais quand il faisait si froid. Je vais me coucher avec cette douce idée, dors bien cette nuit et rêve à ton mari qui se trouverait heureux, même loin de toi, s'il pouvait être malade à ta place. Que je t'embrasse !

A Madame Ampère, chez Mme Carron, rue du Griffon, à Lyon.

Please cite as “L218,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 26 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L218