From Julie Carron-Ampère (1ère femme d'Ampère)   11 mars 1803

[284]DuVendredi matin [11 mars 1803]

[illeg] Je trouve à la fin de ta lettre 1 un article qui est cause de bien des réflexions [illeg] D'abord je te dirai que je me serais déjà levée si le temps avait été plus doux [illeg] L'on m'a dit que l'été dernier M. Duplentié, préfet de Bourg, avait amené à Lyon une jeune dame qui avait des grosseurs dans le ventre et n'avait plus ses règles. Elle était bien malade ; elle fut s'établir en Bellecour pour prendre des eaux factices. Elle est très bien remise, à ce que l'on dit. Ne te serait-il pas possible de savoir si cela est vrai et quelles sont les eaux qu'elle a prises ?[illeg]

[285] A présent parlons de tes espérances pour le Lycée ! Elles paraissent bien fondées ; mais encore tu n'es pas sûr d'y être admis. Tu sais, mon bon ami, combien je désirais notre réunion au 1er germinal. Cependant il faut toujours consulter la raison avant son plaisir et, si le Lycée tarde quelques mois à s'établir, que ferais-tu ici ? Car il n'y a pas de possibilité de donner des leçons au Griffon, à moins que nous ne partions toutes pour la campagne. Alors tu l'aurais tout à toi. Mais je ne vois pas que ma santé ni le temps me permettent d'y aller avant le mois d'avril. Tu penses que tu pourrais attendre le Lycée à la campagne ; je trouve que ce n'est pas faisable ; car, si un autre était nommé que toi, quel pauvre air aurais-tu de sortir de ta campagne pour venir picoter des élèves ! D'ailleurs combien de choses essentielles ignorerais-tu si tu étais à la campagne, lors même[286] que tu viendrais souvent à Lyon. Tu vois, mon bon ami, que je trouve bien des raisons pour faire comme les autres professeurs. Car nous n'entrons dans notre appartement qu'à la Saint-Jean ; le Lycée s'établira d'ici là et, si tu n'es pas nommé, tu auras tout de suite de quoi donner des leçons sans avoir un air errant. Et puis, mon bon ami, compte que nous avons bien besoin de l'argent que tu peux gagner ! En nous remettant dans notre ménage, nous aurons bien des dépenses à faire. Tu gagnes là-bas au moins 60 L. par mois chez M. Dupras, et puis tes appointements. Ne crois pas que l'intérêt me fasse parler ; mais c'est la nécessité. Car tu trouves cet appartement cher ; je suis fâchée d'avoir terminé si tu espérais trouver mieux, mais, voulant avoir une pièce pour des élèves, nous n'aurions trouvé en point d'endroit plus bas prix et l'agrément de pouvoir sous-loue. En Bellecour à l'étage des[287] dames Allard il y en avait m[ais] pas si grand de [illisible] mais [illisible] était pas près de ma sœur et encore moins de maman. [illisible]

Voilà mon ami toute ma réflexion. Tu es bien libre de faire tout ce que tu voudras et je serai toujours contente. Mais pense toi-même que nous avons un petit et qu'il faut tout faire pour lui. [illeg] Si tu restes, c'est un sacrifice que tu fais encore pour ton petit et pour moi. Tu me fais tous ceux qui te coûtent le plus. Aussi mon cœur sait les apprécier et te chérir bien fort. Adieu, mon fils, adieu mon bon ami. Adieu, ménage-toi et aime ta Julie !

(2) Voir la Lettre 0226.

Please cite as “L231,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 28 March 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L231