To Julie Carron-Ampère (1ère femme d'Ampère)   12 avril 1803

[1438] Bourg le mardi [12 avril 1803?]

Je ne veux pas m'aller coucher ce soir sans écrire à ma bonne amie. Je me suis privé ces deux jours-ci de ce \du/ plaisir pour écrire mon ouvrage ; le plan en est achevé et écrit en abrégé ; le tiers environ est au net ; mais je sens bien que, quand tout sera fini, il faudra tout récrire pour corriger les incorrections et les fautes de style. Je ne puis donc pas dire précisément quand je pourrai commencer l'impression. J'y ai travaillé sans discontinuer ces deux jours ; aussi ai-je bien mal à la tête ce soir. Toutes mes pensées sont absorbées dans mes calculs ; mais l'amour pour Julie ne[1439] quitte pas mon cœur. Je t'envoie 6 louis par Pochon, j'en garde un parce que je ne sais pas si je n'en aurai pas besoin. Les neuf francs que j'avais devant moi sont déjà bien diminués, par les blanchissages, du papier, de l'encre, un canifparce que j'avais perdu le mien, etc. Je n'ai pas encore reçu les 12 l[ivre]s du préfetparce que j'attendais qu'il me les envoyât, et qu'il attendait apparemment que je fusse le voir. J'y irai demain, d'autant mieux qu'une affaire de M. Goiffon me donne lieu d'y aller, sansqu'il semble que ce soit pour mon argent.

Du mercredi matin Ma charmante amie, notre absence durera-t-elle encore[1440] longtemps ? Je commence à bien m'en ennuyer. Quand je dis que je commence, il y a longtemps que c'est commencé, mais je le sens tous les jours davantage. Je ne sais comment tu te trouves à présent, si ta santé te permet de jouir un peu du beau temps. Si du moins je pouvais savoir tous les jours de tes nouvelles, le temps ne me paraîtrait pas si l[ong.] J'en espère pour demain. Adieu, ma Julie, ton ma[ri] t'embrasse mille \fois /et ton p[etit] et tous ceux qui t'aiment. J[e vais] vite porter la lettre et l'argent à Pochon. Je voudrais bien que tu me rappelasses au souvenir de la maison Périsse. Celui qui t'aime. A. AMPÈRE Je t'envoie le livre de[1441] Ballanche qui doit être bien en colère contre moi de l'avoir apporté ici et gardé si longtemps. Je vous conseille cependant, à toi et à élise, de ne pas le rendre que vous ne l'ayez lu, surtout s'il ne faut que 2 ou 3 jours pour cela. Je t'embrasse, je t'embrasse, je t'aime.

A Madame Ampère, chez Mme Carron, rue du Griffon, n° 15, à Lyon.

Please cite as “L243,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 24 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L243