To Balthazar Hubert de Saint-Didier   6 octobre 1804

6 octobre [1804]

J'ai reçu votre lettre à la campagne, mon cher Saint-Didier ; il n'y a pas longtemps qu'elle m'est parvenue parce que la poste ne vient pas à Poleymieux. De retour à Lyon où je vais demain recommencer mes leçons au Lycée, je m'empresse de répondre à vos questions...

Le meilleur livre de chimie, contenant à la fois une bonne pratique et beaucoup d'application est le manuel de chimie * de Bouillon-Lagrange en deux gros volumes in-8° qui coûtent, je crois, 19 livres. Il y a des gravures d'appareils qui en rendent très claires les descriptions. Je ne connais point d'ouvrage sur la physique où l'électricité et surtout le galvanisme soient traités convenablement. La meilleure physique moderne est celle de Libes * en 3 volumes in-8° ; mais on n'y trouve pas ce que vous désirez. Mettez dans une fiole de médecine 1 partie de phosphore, 4 parties d'eau et 16 de chaux récemment éteinte à l'air et réduite par là en poudre blanche. Le phosphore étant coupé en petits morceaux, on fait du tout une sorte de pâte. On adapte un tube courbé à la fiole qui va plonger dans l'eau ; on (fait) chauffer la bouteille et l'eau se couvre de bulles qui donnent en se crevant des jets de feu superbes. On peut concevoir le même gaz sous une cloche renversée pour l'en faire sortir à volonté ; mais il ne faut pas l'y laisser séjourner parce qu'il s'absorbe dans l'eau.

Je n'ai point vu Mme [illeg] qui est à Collonges et j'ignore entièrement ses projets et le temps de son retour à Paris. Il faut, pour faire de l'oxygène avec le manganèse, que l'acide sulfurique soit étendu de deux ou trois fois autant d'eau, et le manganèse pulvérisé ; la proportion est indifférente, mais il est clair que c'est l'acide qui doit dominer et de beaucoup à cause de l'eau qui y est mêlée.

Voilà, mon cher Saint-Didier, les éclaircissements que vous me demandez. Je serais bien aise s'ils vous faisaient plaisir. Quant à moi, je ne songe guère à tout cela ; je cherche à distraire mon esprit en l'appliquant à des choses bien abstraites. C'est ce qui m'a fait préférer à toute autre étude pendant les vacances la lecture des ouvrages de métaphysique. Je vous prie, mon cher Saint-Didier, d'agréer l'assurance de mon amitié et de mon dévouement. A. AMPÈRE Je vous prie de présenter mes respects à Madame votre mère et à Monsieur Michon.

A Monsieur, Monsieur de Saint-Didier, chez M. Michon, à Priay, par Pont-d'Ain, département de l'Ain.

Please cite as “L254,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 26 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L254