To Claude-Julien Bredin   18 janvier 1806

[18 janvier 1806]

Il y a trop longtemps, cher Bredin, que je suis à Paris sans nouvelles de Lyon ; c'est ma faute puisque je n'écris pas ; mon temps se perd en des occupations aussi nombreuses que multipliées : des visites aux membres de l'Institut, l'embarras d'une installation. Enfin me voilà au collège de Navarre dans un commode appartement préférable à celui que j'avais au Palais-Bourbon. Seulement, à la place de beaux marronniers en fleurs, je ne verrai au printemps qu'une petite et triste cour. Depuis mon retour, je n'ai eu de moments agréables que ceux que j'ai passés à disputer avec Maine de Biran. Il est parti, me laissant tout entier livré aux ennuis du moment présent et, ce qui est bien pire, à mes souvenirs.

Près de vous, mon imagination m'offrait encore quelques espérances d'avenir. Seul ici, je revois sans cesse, comme il y a deux ans, l'image de celle qui a rempli ma vie de tant de charme. Je relis ses lettres et partout je retrouve les monuments de mon bonheur perdu. Comme je regrette d'avoir quitté le lycée de Lyon ! Je n'aurais point abandonné ma mère, mon fils et vous tous ; je serais meilleur que je ne le deviens. écrivez-moi, vos paroles sont un baume de paix ; je tombe dans des accès de désespoir quand je suis longtemps sans les entendre. Vous avez des chagrins aussi, mais j'admire votre résignation. Dites à Roux qu'il est impossible de retirer les mémoires envoyés au concours : c'est la propriété de l'Institut. A. AMPÈRE

Please cite as “L286,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 16 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L286