To Claude-Julien Bredin   25 février 1806

[25 février 1806]

Tesseyre est entré au séminaire ; toute sa vie sera donc consacrée au bien. M. Berthier, qui le remplace à l'école polytechnique, a eu la générosité de se charger de donner à Mentelle des leçons particulières gratis. Puisse ce jeune homme, qui a quitté son pays et ses parents pour cette folle passion des sciences qui m'a fait tant de mal, être bientôt désabusé et retourner vivre heureux et utile à ses semblables à l'Argentière !

Oh, Dieu, où me conduisez-vous par des routes si éloignées du but que je voudrais atteindre ? Bredin, vous qui concevez clairement qu'il n'y a pas d'opposition entre la bonté du Créateur et la damnation des réprouvés, tâchez de me convaincre ! Travaillez avec Bonjour à me montrer la vérité ! Qu'il fasse les objections, vous les réponses ! Puis, envoyez-moi le résultat de vos conférences, il me fera peut-être changer de point de vue. Prêtez-vous à mon désir pour me sauver du gouffre où je tombe ! D'Ambérieux ne refuserait peut-être pas non plus d'essayer de m'éclairer.

Vous me parlez de l'immortalité de l'âme. Jamais le doute ne s'est étendu en moi jusque-là. Je sais que la révélation peut seule en démontrer la certitude. Cependant l'édifice est debout, stable quand la base chancelle. Que deviendrai-je à ce moment terrible où mon corps restera loin de moi à quelle existence passerai-je ? Que l'état de Tesseyre, dont il est si digne, fait envie ! Vous êtes bon d'avoir été à Poleymieux. Le passage de votre lettre où vous parlez de mon pauvre enfant, de maman, de ma tendre maman, m'a rendu bien heureux. Pourquoi me suis-je séparé d'eux ? Adieu. A. AMPÈRE.

Please cite as “L288,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 24 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L288