To Elise Carron (sœur de Julie)   7 mai 1806

7 mai [1806]

Ma chère sœur, combien ta lettre a soulagé mon cœur ! Quel plus grand service peut-on rendre à une âme agitée de sentiments contraires que de la réconcilier avec elle-même ! Je t'avouerai que je l'ai montrée, cette lettre, à celle dont dépend à présent mon sort et que c'est avec un grand plaisir que j'ai vu combien elle en était attendrie, avec quel sentiment elle m'a promis d'être la mère de mon fils. Actuellement, rien ne manque à ce que je sois aussi heureux qu'il était possible que je le devinsse. Il n'en est pas de même de toi, ma chère sœur, je sens d'ici tes peines. Ah si du moins tu pouvais retrouver cette paix de l'âme qui tient lieu de bonheur à ceux qui ne l'espèrent plus ! Quand tu auras le temps de m'écrire, donne-moi de tes nouvelles et de celles de ta mère, de celles aussi de Mme Périsse. Marsil m'en a donné qui m'ont fait un grand plaisir quoiqu'elles ne soient pas encore aussi bonnes que je le désirerais. Quand tu iras chez MM. Périsse, dis-leur mille choses de ma part. Embrasse pour moi ta sœur, son mari et ses enfants. Je ne sais pas si tu sais que j'ai été présenté à l'Empereur, il y a quinze jours. J'ai vu tout à loisir cet homme célèbre à qui je sais que tu prends l'intérêt qu'inspire l'admiration. Que n'a-t-il en sensibilité ce qu'il a en génie ! Quel homme ce serait !

Adieu, ma sœur, aime-moi toujours, pense à moi et m'écris quelquefois. Ballanche est venu passer quinze jours ici. Il est reparti. J'ai eu bien du plaisir à le voir. Il est venu plusieurs fois chez M. Poteau. Reçois tous les vœux que forme pour la paix, pour le bonheur de ta vie s'il est possible, ton affectionné frère A. AMPÈRE

A Mademoiselle Élise Carron, à Lyon

Please cite as “L294,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 24 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L294