To François Carron (frère de Julie)   11 juillet 1807

11 juillet 1807

Depuis si longtemps, mon cher frère, mon bon ami, que les circonstances m'ont empêché de te voir, je sais bien que tu ne m'en as pas voulu, tu devinais une petite partie de ce que je souffrais, tu savais que je ne pouvais faire un pas. Je n'ai pu me résoudre, dans les premiers moments des événements si pénibles qui m'ont rendu quelque liberté, à t'aller voir dans un quartier dont je ne voudrais jamais approcher : répugnance que le seul désir de t'aller voir pourra me faire vaincre par la suite.

Mon cher ami, si tu me conserves l'amitié que tu avais pour moi avant mes faiblesses et mes derniers malheurs, procure-moi le plaisir de te voir, soit en m'indiquant un jour et une heure où je fusse sûr de te trouver dans l'endroit que tu choisirais, soit, si cela ne te dérangeait pas, en convenant de nous trouver tous deux lundi prochain à 5 heures du soir dans l'allée du Palais-Royal où se trouve la Rotonde et près d'elle. Tu me ferais le plaisir de dîner avec moi et c'en serait un bien pour moi. Que de choses j'aurais à te dire ! Le seul bonheur qui me reste est de m'occuper de ce charmant enfant que je n'ai pas vu depuis deux ans, mais que je vais bientôt revoir pour ne plus m'en séparer. Mon frère, je n'ose te prier de venir jusqu'au Ministère de l'Intérieur où je demeure dans la même maison que le ministre. Tu sais où c'est. Je sens que cette course te ferait perdre trop de temps. Cependant, s'il t'était plus commode que je m'y trouvasse à une heure que tu choisirais, tu n'aurais qu'à me l'indiquer de la veille. Mais, si tu es libre lundi à l'heure du dîner, je préfère bien cet arrangement. Nous pourrions être une heure ensemble sans que tes occupations en souffrissent. Je serai donc lundi à 5 heures près de la Rotonde dans l'allée du Palais-Royal où elle se trouve. L'idée de te voir et de t'embrasser après-demain est bien douce pour moi. Elle m'aidera à supporter la vie ces deux [illeg] comme celle d'être auprès de mon petit vers le milieu d'août m'a consolé et soutenu dans tout ce que je viens de souffrir. J'ai été bien agité, mais je suis calme à présent. Rappelle-moi au souvenir de ma sœur ; assure-la de mon respect et de mon amitié. Mon bon ami, je t'embrasse de toute mon âme ; ton frère A. AMPÈRE

Mon adresse est Ampère, secrétaire du Bureau consultatif près le Ministère de l'Intérieur, hôtel de Conti, rue de Grenelle-Saint-Germain, n° 10.

A Monsieur Carron, courtier de commerce, rue Basse-Porte-Saint-Denis, n° 18, à Paris.

Please cite as “L327,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 24 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L327