To Jean-Jacques Ampère (fils d'Ampère)   30 mai 1810

[261] Dijon 30 mai 1811 [1810] 1

Ta lettre, mon bien bon ami, m'a fait le plus grand plaisir, et j'ai été bien fâché de n'avoir pu trouver un instant à Lyon pour t'écrire à mon tour. Mais j'y ai été tellement affairé que cela m'a été d'une impossibilité absolue, et ce n'est qu'ici où je suis arrivé hier au soir très tard, que je puis enfin causer un peu avec toi comme je le désirais depuis si longtemps. Je le désirais plus encore dans la circonstance importante où tu [te] trouvais et qui, en attirant sur toi les bénédictions du ciel et celle de ton père, te fait prendre place parmi les hommes, et quitter tout ce qui tient de l'enfance. Je ne doute pas que tu n'aies fait de sérieuses réflexions et pris toutes les résolutions que cette époque de ta vie doit t'inspirer. J'en vois en partie l'effet dans ce que tu m'écris de la satisfaction que M. Belin a de ta conduite ; mais je ne doute que j'en voie bientôt d'autres effets plus importants encore dans ton obéissance et ta douceur envers ta tante et dans tout l'ensemble de ta conduite.[262]Tu me demandes ma bénédiction, et je te l'ai donnée au plus profond de mon cœur pour que tu sois toute ta vie vertueux et bienfaisant et, par conséquent, heureux.

Je voulais t'écrire de Lyon afin que tu m'écrivisses à Dijon, département de la Côte-d'Or ; tu en as encore le temps au cas que tu ne l'aies pas fait, et ce sera un vrai bonheur pour moi de recevoir une seconde fois de tes nouvelles. Mais il faudrait pour cela m'écrire tout de suite : Poste restante, Dijon, département de la Côte-d'Or. J'ai vu à Lyon ta grand'maman, ton oncle, ta tante Périsse, et tous tes cousins et cousines qui m'ont beaucoup parlé de toi ; je leur ai dit, comme tu m'en avais chargé mille choses de ta part... Je suis fâché à présent que tu ne m'aies pas envoyé, pendant que j'étais à Lyon, des lettres pour au moins ta grand'maman et ta tante que je leur aurais remises.

Si tu m'écris, tu me feras bien plaisir de me donner des détails sur le travail particulier que tu fais, je crois, à présent tous les jours avec M. Belin, sur tes succès tant dans ce travail que dans tes études ordinaires, sur tes[263] places de chaque semaine, etc. Mon bon ami, si je [ne] t'ai pas écrit plus souvent, cela vient uniquement de ce que j'ai été surchargé d'ouvrage outre mesure, et plus que dans aucune autre tournée à cause du peu de durée de celle-ci. Je n'ai cessé de penser à toi : ta lettre m'a fait tant de plaisir que j'ai regretté de n'en avoir pas reçu plusieurs. J'ai été enchanté de ce que ma sœur m'a dit de celle que tu lui as écrite. Elle m'en a parlé en termes pleins d'amitiés pour toi, et qui m'ont montré qu'elle en avait été très touchée. Conserve bien ses dispositions à ton égard par toutes sortes de déférence, de reconnaissance et de tendre amitié pour elle ! Embrasse-la bien pour moi ainsi que le petit chat et, si tu les vois, ton oncle et ta tante Carron, Elisa et Pignot. Adieu, mon bon ami ; je t'aime et t'embrasse mille fois de toute mon âme. A. AMPÈRE

A Ampère fils, chez M. Letellier, rue de Vaugirard, à Paris.
(2) Ampère a daté 1811 et non 1810 ; mais 1811 doit être une inadvertance. En 1811, Ampère passe un mois à Lyon, va de là à Grenoble, est le 20 mai à Aix, continue sur Marseille et Montpellier au début de juin, Avignon et retour par Lyon. Il ne peut donc, entre Aix et Marseille, remonter à Dijon le 30 mai. En 1810, au contraire, nous le voyons passer rapidement à Lyon, aller à Dijon, à Genève, Grenoble, Gap, Toulon, Nîmes et Montpellier. Dans la Lettre 0368, Ampère dit bien que les deux tournées de 1810 et 1811 ont été analogues. Cette lettre a été écrite à l'occasion de la première communion de Jean-Jacques [né le 12 août 1800].

Please cite as “L361,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 24 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L361