To ?   6 juillet 1810

6 juillet 1810

Monsieur, cher et respectable collègue, c'est tant en mon nom que pour M. Roman qui m'en a prié pour sa part, que je vais d'abord vous rendre compte de la commission que vous nous aviez confiée pour M. l'amiral Ganteaume, ou en son absence pour M. le Préfet maritime.

M. l'Amiral étant à Paris, j'ai montré à M. le Préfet maritime le mémorandum où il était nommé et la lettre qui était adressée à M. Ganteaume. Il a ouvert cette lettre et, après l'avoir lue, il m'a dit qu'il aurait l'honneur de vous écrire, mais que les lois relatives à la marine s'opposaient absolument au succès de la demande de M. Sagnier. Elles défendent expressément, d'après ce qu'il m'a dit, de faire passer un homme porté sur les rôles de la marine active et engagé au service de mer dans une place d'administration. Il croit d'ailleurs que, si le jeune homme est en âge de se présenter comme aspirant aux concours de la Marine, il y fera, avec son titre actuel de chef de timonerie, un chemin rapide et s'ouvrira ainsi une carrière plus brillante. M. le Préfet maritime a ajouté qu'il verrait le jeune Sagnier et que, dans le cas où il n'aurait pas passé l'âge fixé, il obtiendrait de son capitaine la permission qu'il donnât une grande partie de son temps aux études nécessaires et qu'il ferait tout ce qui dépendrait de lui pour les lui faciliter. Si l'âge de M. Sagnier ne lui permet plus d'entrer dans cette carrière, le Préfet maritime pense que ce qu'il y aurait de plus avantageux pour lui serait de devenir capitaine de long cours sur des bâtiments d'armateur. Je vous répète, mon cher et respectable collègue, tout ce qu'il m'a dit. Je ne connais rien à l'ordre établi dans la Marine et ne peux juger du parti le plus avantageux. C'est au jeune Sagnier à décider avec ses parents s'il doit tendre vers la marine de l'état, ou celle des vaisseaux, propriété particulière. Vous pouvez toujours l'engager à voir le Préfet maritime qui est prévenu et m'a promis de faire tout ce qui dépendrait de lui. Je suis bien fâché que ce que désirait ce jeune homme soit précisément ce qui lui est interdit, à en juger d'après la conversation dont je viens de vous donner la substance.

Nous vous prions de vouloir bien agréer de nouveau tous nos remerciements pour les témoignages d'amitié et les prévenances dont vous nous avez comblés tous les deux pendant notre séjour à Genève. Nous désirons bien vous voir à moitié chemin de Nîmes à Montpellier. Je pense que nous serons à Nîmes les premiers jours d'août. Pourriez-vous être assez aimable pour nous marquer poste restante à Nîmes l'époque où vous serez à Montpellier ?

M. Roman me charge pour vous de mille compliments, de mille témoignages de la plus sincère amitié, de la plus haute estime. Ces sentiments sont aussi gravés dans mon cœur et ne s'en effaceront point tant qu'il battra. Ce sera toujours avec un vif plaisir et une reconnaissance plus vive encore que je reporterai sans cesse ma pensée sur ce court séjour à Genève où j'ai reçu de vous tant de marques d'amitié. Ce jour sera un des beaux jours de ma vie, où j'aurai l'honneur de vous revoir et de cultiver une liaison si honorable pour moi et si précieuse à mon cœur.

Je suis, Monsieur et cher Collègue, votre très humble et très obéissant serviteur. A. AMPÈRE

Please cite as “L363,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 25 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L363