To Claude-Julien Bredin   décembre 1810

[Fin décembre 1810]

[illeg] [10] amitié, c'est tout ce qui me reste. écris-moi le plus longtemps que tu pourras, c'est ma seule consolation. J'ai quelque espoir de faire l'année prochaine le même voyage que l'année passée. Puisse cet espoir se réaliser ! Puissé-je y passer encore quelques jours près de toi !

Vois-tu, Bredin, ton ami est un gouffre qui s'approfondit toujours ; il me faudrait deux jours de conversation pour te faire comprendre tout ce que je pense, tout ce que je sens en moi et dont je m'occupe sans cesse dans mes mélancoliques rêveries ; mais, au lieu de cela, sitôt que nous serions ensemble, d'autres idées, d'autres sentiments viendraient m'occuper. Le bonheur chasserait pour un temps ces noires pensées, et nous passerions encore bien des jours ensemble, sans que j'eusse seulement pensé à te parler de ce qui m'occupe le plus loin, de toi. C'est déjà ce qui m'est arrivé l'année passée.

Adieu, bon ami, pourquoi t'ai-je parlé de tout cela, je ne puis par lettre te faire comprendre le sujet de mes peines, je ne puis que joindre, en t'en[11] parlant, une inquiétude de plus, à celles dont tu es peut-être accablé dans ce moment, car ton silence est trop long pour me laisser sans crainte. Mon ami, je te le demande en grâce, un mot, un seul mot qui m'ôte cette inquiétude si, comme du moins je l'espère, tout ce qui te touche est en bonne santé. Adieu, Bredin, ton ami t'embrasse de toute son âme, tu sais bien avec quelle tendresse.

A monsieur Bredin fils professeur d'anatomie à l'École vétérinaire, près des portes de Vaise, à Lyon (Rhône)

Please cite as “L369,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 25 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L369