To Claude-Julien Bredin   février 1812

[Fin février 1812 ?]

[73]Mon bon ami, ta dernière lettre m'a fait le plaisir que je ne manque jamais d'éprouver quand je reçois de tes nouvelles et que je peux lire ce que tu as pensé, ce que tu as écrit pour moi.

Je voudrais te répondre bien au long pour recevoir de toi une nouvelle lettre détaillée, car rien ne me fait tant de bien, en même temps que le temps que j'emploie à te lire est un temps de bonheur et que je n'en ai guère d'autres. Toujours plus d'occupations que je n'en peux faire, pas un moment de liberté ; aujourd'hui même je n'ai que quelques instants dont je puisse disposer et je ne pourrai te conter ce que tu me demandes au sujet de M. Portalis lorsqu'il était directeur de l'imprimerie. Je te dirai seulement que cela n'est relatif ni aux fonctions de cette place, ni aux circonstances qui l'en ont privé, quoique inspiré[74] de même par le sentiment que tu sais, d'où résulte tant de bien et tant de mal.

J'espère passer à Lyon cette année, mais je tremble de trop m'en flatter. Je pourrais donc te voir dans deux mois ! Mon ami, que cette idée est pleine de charmes pour moi ; mais qu'il me sera pénible de voir disparaître comme un éclair le peu de temps que je passerai à Lyon ! Combien a peu duré celui que j'y ai passé l'année dernière !

Je m'afflige de penser que tous ceux que j'aime le mieux à Lyon ne se voient presque jamais ! Pourquoi vis-tu si éloigné de Ballanche et de Bonjour ? Si vous vous voyiez quelquefois les uns les autres, vous parleriez de moi entre vous et ce serait si doux pour moi quand vous me l'écririez. D'ailleurs ce serait un vrai plaisir pour toi et qui, je crois, te ferait du bien. Tu en serais moins mélancolique.

[75] Ballanche est si bon et si aimable ; Bonjour aussi. Ballanche aurait besoin des consolations que tu pourrais lui offrir ; il doit être bien triste de l'accident arrivé à M. Polingue ; je ne sais aucun détail à cet égard. Est-ce que ces absences de tête sont de nature à durer toujours ? écris-moi, je te prie, ce qu'il en est, et ce que tu crois qu'on peut espérer relativement à sa guérison.

Tu sais qu'on n'a trouvé personne pour louer la maison de Poleymieux. Si ta femme et tes enfants pouvaient enfin s'y établir comme tu me l'avais promis les autres années, tu sens quel plaisir ce serait pour moi. Mon ami, je crois que je serais content si tu me répondais que cela pourra s'arranger, pour ce printemps et[76] cet été. Est-ce qu'il faudra que cette contrariété que j'éprouve clans tout ce que je souhaite vienne encore faire naître des obstacles ? Adieu, mon ami, il faut que je te quitte ; mais ma pensée reste avec toi. écris-moi, écris-moi je t'en prie et aime-moi toujours comme je sais bien que tu m'aimeras toujours, comme tu sais bien que je t'aimerai toujours.

A monsieur Bredin fils Professeur à l'École vétérinaire, près des portes de Vaise, à Lyon (Rhône)

Please cite as “L408,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 23 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L408