From Claude-Julien Bredin   19 mars 1812

[20] 19 mars 1812

Tu me recommandes beaucoup de voir Bonjour [illeg] Tu sais, mon ami, que souvent ce digne homme a des affections nerveuses qui le disposent bien mal pour recevoir ceux qui se présentent à lui. La lettre où tu me parlais d'une découverte chimique m'a offert deux fois des prétextes. Nous avons un peu ri de ta grande époque[21] pour le Genre Humain. Nous t'avons bien reconnu là. Je vois aussi que le genre humain est arrivé à une singulière époque. [illeg] Nous sommes allés ensemble au sermon. Il y a, à Saint-Nizier, un prédicateur dont Bonjour est enthousiasmé. [illeg] [22] [illeg] [23] J'ai vu Ballanche. Nous ne concevons pas qu'il puisse être si important de garder le secret sur ton voyage à Lyon. Mais il sera religieusement gardé, pourvu que tu viennes [illeg] et encore pourvu que tu demeures à la maison[illeg]

[81] 20 mars 1812 [illeg]Hier soir, je me suis livré au désespoir, j'étais comme enragé. Mon ami, je te l'ai souvent dit : il y a dans mon être quelque penchant à la férocité [illeg] Est-ce par hasard que je t'ai connu ? Est-ce par hasard que tu as eu un rôle si prodigieux pour me donner la croyance qui seule pouvait me servir de répressif ?[illeg] [82] Hier, j'ai fait aux élèves assemblés un sermon sur la mort ; j'ai touché les cœurs ; j'ai fortement frappé les imaginations, parce que mon cœur était touché, parce que mon imagination était montée. Un moment avant, un moment après, cela n'aurait plus été la même chose[illeg] Ton Flaxman m'a fait le plus grand plaisir[illeg] Que n'a-t-il fait pour Klopstock ce qu'il a fait pour Dante ?[illeg] Je suis bien fâché que tu ne veuilles pas faire connaissance avec ce beau génie[illeg] [83] [illeg] [84] [illeg]

[73] [illeg] [74] [illeg] [75] Puis-je espérer que tu viendras ? Je crains que l'arrivée à Paris de la personne dont tu me parles ne te[76] refroidisse sur ce voyage.[illeg] Tu fais bien de me rassurer sur des sentiments que j'ai toujours redoutés. Prends-y garde, mon cher ami, ne t'abuse pas toi-même ; ta vie est bien assez orageuse. Je t'en conjure, sois prudent ![illeg] J'ai reçu Flaxman ; je te remercie[illeg] Adieu, as-tu déjà revu l'homme aimable qui a une manière de voir et de sentir si désolante ? Chatelain ne peut pas s'en consoler 1.

(2) Toute la première partie de cette lettre est consacrée à des lamentations sur des chagrins personnels : Ma femme est encore vivante, mais elle n'a plus de santé. Son âme a été encore plus froissée que son corps n'a été épuisé. Elle est toujours aussi aimante qu'autrefois; mais elle n'a plus de douceur de caractère. Elle est toujours aimée; mais il n'y a plus d'épanchements.... Ces huit années qui devaient être le plus beau moment de ma vie, ont été comme une anticipation de l'enfer.... Je me suis vu si heureux et je te devais ce bonheur.... C'est fini !...

Please cite as “L411,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 29 March 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L411