To Claude-Julien Bredin   25 août 1812

[149] Mardi, 25 août [1812]

Mon bon ami, M. Andrieux, qui est parti hier en poste pour Lyon, s'est chargé de remettre chez toi en passant devant ta porte : une petite caisse de sapin contenant quelque chose qui, je l'espère, te fera plaisir (2) ; un paquet où se trouvent quatre volumes d'un théâtre allemand, et une brochure qui est la Jeanne d'Arc de Schiller, dans laquelle j'ai mis la dernière lettre de Maine de Biran et la copie de la réponse dont je t'ai parlé, et qui contient toutes les bases et les principaux développements du quatrième système. Je ne sais quelle inquiétude me tourmente à ce sujet, mais je crains que cette copie vienne à s'égarer ; ce serait pour moi un grand chagrin.

[150]Tu dois recevoir le tout après-demain jeudi, et je te prierai de m'écrire sur-le-champ si tu l'as ; mais il y a apparence que ta lettre ne me trouverait plus à Paris, et que, si tu n'as pas répondu de suite à celle que je t'écrivis l'autre jour, je n'en recevrai point de toi avant mon départ ; ce qui me serait bien pénible.

Depuis les derniers événements dont je t'ai fait part, l'existence m'est si odieuse ici que je vais t'aller trouver dès que j'en aurai la permission du grand Maître. C'est un parti pris. Ce n'est qu'auprès de toi que je puis trouver du repos. L'amitié m'a empêché d'exposer celui de mon avenir, mais je ne sais quel regret, trop offensant pour elle, empoisonnera tant que je serai ici, les dédommagements qu'elle pourrait m'offrir. Toutes les[151] circonstances sont bien plus offensantes encore pour une autre personne dont la proximité me fatigue à présent plus que tout le reste. Mais mon parti est pris. Ainsi, sois bien tranquille ! J'espère t'embrasser dans dix ou douze jours. Il est inutile de parler à personne de mon prochain voyage à Lyon. Je ne me soucie pas qu'on le sache lors de mon arrivée.

Je t'aime et t'embrasse comme mon seul espoir et ma seule ressource dans mes peines. Adieu, adieu, Bredin ; pourquoi ne m'as-tu pas écrit depuis près d'un mois ?

[152]A monsieur Bredin, Professeur d'anatomie à l'École vétérinaire, près des portes de Vaise, à Lyon (Rhône)

Please cite as “L421,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 19 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L421