To François Carron (frère de Julie)   21 octobre 1812

Samedi 17 octobre [21 octobre 1812]

Il y a déjà plusieurs jours, cher frère et bon ami, que je voulais t'écrire. Diverses circonstances impérieuses et le petit voyage que je viens de faire à Saint-Germain m'en ont empêché jusqu'à ce moment. Après quelques hésitations, je me suis déterminé à racheter la portion de ma sœur dans le domaine de Poleymieux pour 25 000 francs. Nous avons arrangé différents termes pour cela et, au bout de six ans, pourvu que je puisse économiser 4000 fr. chaque année, je ne devrai plus rien et je serai possesseur de tout le domaine. Dès à présent je jouis de la totalité, même pour les arrérages du passé. Mon premier payement devant se faire incessamment, je t'irai voir avec ma sœur dès que nous serons à Paris ; je compléterai ce qu'il faudra pour faire 4000 fr. avec le billet que j'ai de toi et tu en feras un au nom de Joséphine. Je chercherai à économiser ensuite de manière à faire dans le courant les autres 4000 fr. pour l'année prochaine et ainsi de suite.

Dans le premier moment, je crus avoir fait un bien mauvais marché, en pensant que les intérêts à 5 % de cette seule moitié équivalait à la totalité du produit net de la ferme de tout le domaine ; mais, en y réfléchissant ensuite, j'ai vu d'autres avantages à cet arrangement. Au reste, c'est fait à présent, et il n'y a plus à délibérer.

Je suis allé aujourd'hui à Saint-Germain où j'ai vu ta Maman en bien bonne santé. Mme Ponction est avec elle ; j'ai ramené mon petit qui était depuis trois ou quatre jours en vendanges. Il en avait passé autant à Bellerive, une semaine à Poleymieux. Il s'est infiniment amusé partout, et il est toujours enchanté d'être venu. Il a été comblé d'amitiés par Mme Carron et Mme Périsse et par toutes les autres personnes de la famille Périsse. Tous se portent bien. J'ai vu aussi Mme Empaire et Francisque en bonne santé ; puissiez-vous être tous de même à Paris.

J'ignore encore le jour précis de mon départ. Mais le 29 est le jour où je dois nécessairement me trouver à Paris et je ferai mon possible pour y être avant. Il me tarde de te revoir et de t'embrasser. Ma sœur et moi t'envoyons mille amitiés et te prions d'en présenter autant de notre part à ta femme et à éliza. Ne m'oublie pas non plus auprès de Pignot. Adieu, mon cher frère, je t'embrasse mille fois de toute mon âme. A. Ampère

A M. Carron, courtier de commerce, rue du Faubourg-Saint-Denis, n° 19, à Paris.

Please cite as “L427,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 28 March 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L427