To Claude-Julien Bredin   4 juillet 1813

[4 juillet 1813]

Tu le sais, cher ami, j'ai souvent formé le vœu, qu'après nous, habitants actuels de la Terre, vint une génération meilleure, une race moins vaine, moins orgueilleuse, moins maligne, moins misérable.

Cette idée m'est venue la première fois que j'ai entendu Cuvier parler des créations successives qui, de perfections en perfections, se sont élevées jusqu'à nous. A présent c'est devenu un ardent désir auquel je m'attache de plus en plus ; c'est un rêve. Ce rêve adoucit mes angoisses.

Songe donc à cette progression. D'abord, rien d'organisé, rien de vivant sur le globe ; puis quelques végétaux d'ordre inférieur, ensuite des animaux invertébrés, trilobites, vers, mollusques. Plus tard, des poissons, des reptiles marins, arrivent des oiseaux, ensuite des mammifères.

Vois-tu, cher ami, les Paléothériums et les Anoplathériums ont été remplacés par les hommes. Eh bien moi, j'espère qu'à leur tour les hommes seront remplacés par des créatures plus nobles, plus dévoilées, plus sincèrement amies de la vérité. Je donnerais la moitié de ma vie pour en avoir la certitude. Et il y a des gens assez stupides pour me demander ce que je gagnerais à cela ! écris-moi, tu sais à quel point j'ai besoin de tes lettres.

Please cite as “L452,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 29 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L452