To Félix Savary   6 septembre 1822

6 septembre 1822

Mon cher et excellent ami, que je me repends de ne vous avoir pas écrit plus tôt, je m'aperçus presque aussitôt après votre départ de la cause de l'illusion qui nous empêchait de voir que la formule que vous m'aviez donnée la veille satisfaisait à la condition qu'on pouvait remplacer l'élément de courant par un contour polygonal ; nous nous figurions qu'il fallait pour cela que la somme des forces exercées sur chaque partie de ce contour fût égale à celle qui l'est sur le premier élément. Il en est ainsi dans tous les cas où les actions exercées sur les diverses portions du contour polygonal sont dirigées suivant une même droite, ce qui a lieu : quand deux éléments agissent l'un sur l'autre parce que c'est la droite qui les joint ; dans le cas où l'on remplace un cylindre infiniment petit qui agit sur un élément par un petit contour polygonal de cylindre sans changer rien à l'élément, parce que cette droite est la perpendiculaire menée au plan qui passe par l'élément et par le milieu du contour substitué au petit cylindre ; mais quand on substitue un contour à l'élément, les forces exercées sur ses diverses portions sont en général dirigées suivant des droites de directions toutes différentes ; ce n'est plus leur somme qui doit être égale à la force exercée sur l'élément qu'on remplace par le contour, ce sont les trois sommes de leurs projections sur trois axes rectangulaires qui doivent être respectivement égales aux trois composantes de cette force.

Or, c'est ce qui ne peut manquer d'arriver puisqu'en considérant les doubles des aires qui ont pour base l'élément d'abord et ensuite ces portions, et dont les sommets sont aux deux extrémités du cylindre, on a pour chaque action la différentielle du quotient d'une aire divisée par; je vous en prie de simplifier vos calculs par la considération de ces aires, qui donnent sur le champ les forces parallèles à trois axes en divisant par 3 leurs projections respectives sur trois plans, il ne faut plus que différencier chaque quotient en passant d'une extrémité de la projection du petit cylindre, pour avoir les trois forces qu'il exerce parallèlement aux trois axes.

Par toute l'amitié que vous avez pour moi, je vous supplie de m'envoyer ce calcul et celui de l'action mutuelle de deux cylindres infiniment petits dans des directions quelconques, comme il est dans votre mémoire quand ils sont dans un même plan. L'affaire du Bureau des Longitudes a été retardée de 8 jours par l'absence d'un membre, j'espère que tout ira comme nous le désirons mercredi prochain, prochain, j'en suis aussi sûr à peu près qu'on peut l'être. Si l'on voulait me décharger d'une certaine obligation, j'irais vous voir cette semaine, mais ne m'en envoyez pas moins ces calculs, je vous le demande en grâce. Votre meilleur et plus tendre ami. A. Ampère

Mille et mille amitiés de ma part à M. Dupré.

Please cite as “L628,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 19 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L628