To Auguste de La Rive   5 août 1826

[5 août 1826]
Mon cher et excellent ami,

J'ai reçu avec un grand plaisir la lettre où vous m'annoncez un événement si heureux pour vous que votre mariage avec une personne qui réunit tout ce que vos amis pouvaient désirer pour assurer votre bonheur. Les détails où vous entrez à cet égard, et où j'ai vu une nouvelle preuve de votre amitié pour moi, m'ont intéressé on ne peut davantage. Il me tarde maintenant de vous voir bientôt à Paris ainsi que Mme de La Rive, à qui je vous prie de présenter tous mes hommages, en attendant que je puisse les lui offrir moi-même quand vous l'amènerez à Paris ; j'espère d'après votre lettre que ce sera bientôt.

Je vous prie aussi d'offrir mille compliments et respects de ma part à Monsieur votre père et à Madame votre mère. Ne m'oubliez pas non plus, je vous prie, auprès de ceux de vos compatriotes qui veulent bien me conserver leur amitié, et surtout à M. Maurice. A l'égard de ce que vous me demandez relativement à l'instrument que j'ai imaginé pour les expériences électro-dynamiques, je puis vous assurer que, tel qu'il est construit actuellement par M. Pixii, il réunit tous les avantages qu'on peut désirer pour les expériences, soit de démonstrations, soit de recherches, et que je n'y ferai certainement plus aucune sorte de changement. Ainsi, je serai charmé que vous profitiez de l'occasion pour le procurer au cabinet de physique de Genève, vu que l'on ne peut guère se faire une idée parfaitement nette de tous les phénomènes que présente l'électricité en mouvement.

Je vois souvent ici deux Genevois que leur zèle pour les sciences et leurs succès en ce genre rendent très recommandables, MM. Colladon et Sturm. Je pense que le premier lira lundi prochain à l'Académie des Sciences un petit mémoire sur quelques faits très intéressants qu'il vient de découvrir. Tandis que vous agrandissez par vos recherches le domaine de la physique, on s'efforce ici de ne pas rester en arrière, et, à la séance de lundi dernier, M. Savary a lu un mémoire sur des phénomènes très singuliers qui ont lieu lors de l'aimantation des aiguilles d'acier par le courant électrique. Vous avez pu en voir un résumé très bien fait dans le Globe du jeudi 3 août dernier ; cette espèce de journal contient en général un excellent précis de chaque séance de l'Académie des Sciences.

Ces nouveaux faits, joints à ceux que vous avez découverts relativement aux analogies du courant électrique et de la lumière, et sur la propriété d'en produire un nouveau que manifestent les fils qui ont servi de conducteur à un courant, et à l'action des disques en mouvement qu'a trouvée M. Arago, semblent annoncer qu'on connaîtra bientôt la vraie cause de tous ces phénomènes et qu'on la trouvera dans les mouvements imprimés au fluide qui remplit l'espace, formé par l'union des deux électricités, et dont les vibrations ou une suite de combinaisons et de décompositions de ces deux éléments constituent la lumière.

Je suis, avec la plus parfaite considération, Monsieur et bien cher ami, votre très humble et très obéissant serviteur. A. Ampère

A Monsieur Auguste de La Rive, professeur à l'Académie de Genève , rue de l'Hôtel-de-Ville à Genève, Confédération helvétique

Please cite as “L698,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 19 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L698