To Jean-Jacques Ampère (fils d'Ampère)   août 1829

[Août 1829]

[351]Cher ami, excellent fils, ayant su qu'il y avait à la poste restante une lettre à ton adresse, je l'ai retirée et je la mets dans celle-ci. J'allais t'écrire hier soir lorsque ta lettre m'est arrivée, je t'en remercie mille fois. J'ai reconnu la justesse de tes comptes, mais la nécessité d'emprunter encore 3000 francs me tourmente beaucoup. Avec les 6000 de M. Constantin et les 4000 de M. Guérin de Foncin, je devrai, au mois d'avril prochain, 13 000 francs qui me coûteront chaque année 650 francs d'intérêt ; encore pourvu que ces 3000 francs qu'il faut emprunter ne soient qu'à 5 pour 100. Au reste, je te supplie de n'en pas emprunter davantage. Je suis à Lyon au moins jusqu'au milieu d'octobre, la dépense est à peu près nulle d'ici là ; mettons 200 francs outre les 250 qui me restent c'est bien plus qu'il ne me faut, le voyage compris, et je ne serai au plus que cinq mois dans le Midi. A 200 francs par mois, ce serait 1000 francs. En tout 1200 francs. Comme je pourrai passer au moins un mois à Orange pour rien en m'y arrêtant quinze jours à l'aller et quinze jours au retour, ce[352] mois serait pour la dépense du retour, en sorte qu'il suffirait de grand reste que tu m'apportasses 1200 francs et, comme je n'en dois de déficit que 1600, tu m'en apporteras 1400 ; encore 200 francs pour les choses imprévues.

Si tu empruntes tout de suite les 3000 francs, il n'y a, je crois, plus d'avantage à obtenir la compensation avec l'Université. Ce ne serait que dans le cas où M. Alphonse 1 ne pourrait faire prêter que sur des billets à courte échéance qu'il y aurait de l'avantage à l'obtenir. Alors il suffirait, je crois, de 1500 francs à présent et la certitude d'en avoir 1500 autres au mois d'octobre prochain, pour payer le billet de Troyes du 15 octobre montant à 1000 francs et celui du 15 novembre montant à 500 francs, total 1500 francs.

Si M. Alphonse voulait deux billets de 1500 francs chacun à neuf mois de date, l'un du 31 août [1829] au 31 mai 1830, époque où je recevrai l'avance de ma tournée de l'année prochaine,[353] l'autre du 10 octobre 1829 au 10 août 1830 : époque où les seuls appointements de l'Université, avec ceux de l'Institut accumulés pendant trois mois de tournée, font plus de 1500 francs, j'aurais le moyen de payer ces deux billets à ces époques et je serais hors d'affaire pour le nouvel emprunt. Au lieu de deux billets de 1500 francs à neuf mois, on pourrait en faire un à six mois et l'autre à un an ; les payements tomberaient aux mêmes époques. Tu me ferais bien plaisir d'obtenir de ma sœur qu'elle me rendît un service auquel j'attacherais beaucoup de prix. Je voudrais qu'elle rangeât par ordre : dans la bibliothèque du salon, la biographie ; dans celle de ma chambre, le dictionnaire des sciences naturelles et qu'elle m'écrivit s'il ne manque aucun volume de la biographie, quels sont ceux du dictionnaire qui n'y sont pas, parce que j'en ai apporté ici plusieurs et, s'il ne manque à Paris que ceux-là, il n'y en a point de perdus. J'en serai sûr.

[354]Si tu trouves dans ma bibliothèque quelqu'autre livre d'histoire naturelle ou de physique, apporte-les moi en venant ! Cherche, dans la ruelle de mon lit et dans le bas de ma bibliothèque, des brochures que j'ai faites sur l'électricité dynamique et sur la lumière ; apporte-moi trois exemplaires de chacune ! Prends chez Bachelier trois exemplaires de la brochure in-quarto intitulée Mémoire sur l'action mutuelle d'un conducteur voltaïque et d'un aimant * et apporte-les moi !

Apporte-moi aussi un des deux chapeaux qui sont dans mon armoire ; l'un des deux que j'ai ici ne peut plus servir de rien et il faut toujours en avoir deux. Dès que j'aurai vu le sellier Merle, correspondant de M. Cornuot, je t'écrirai à ce sujet.

Vois MM. Cuvier, Poisson, Mussy, les deux Binet, Rendu, etc. Donne-moi de leurs nouvelles ! Je prends bien part à l'affreux malheur d'Arago. Vois aussi M. Savart ! Tu sais ce qu'il faut dire de ma part à toute notre famille, à nos amis. Ma santé s'améliore. Je t'embrasse mille fois. A. Ampère

(2) Alphonse Ride, frère de son gendre, était receveur à Bar-sur-Seine.

Please cite as “L732,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 10 May 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L732