To Jean-Jacques Ampère (fils d'Ampère)   24 mai 1831

[417] Lyon Mardi 24 mai [1831]

Cher ami, ta lettre m'a bien fait plaisir. Tu me demandes de mes nouvelles. Je n'en ai que d'assez bonnes à te donner ; cependant je tousse toujours, tantôt plus, tantôt moins suivant que je prends chaud et puis que je me refroidis : ce qui m'arrive sans cesse comme cela m'arrivait à Paris, quelques précautions que je puisse prendre. Je me suis frotté l'autre jour la poitrine avec la pommade stibiée : ce qui a fait que je n'ai presque pas toussé ces deux derniers jours. M. Gilibert m'a donné un moyen de faire cesser cette tendance continuelle à m'enrhumer, dont je ferai usage pendant ma tournée. J'espère que j'aurai complètement réussi quand je retournerai à Paris.

J'ai une prière à te faire. J'ai laissé, sur un rayon du petit cabinet noir qui est à côté de l'alcôve où je couchais dans ces derniers temps (chambre d'Albine) une toute petite boite pleine de pilules ; ce rayon est contre la séparation entre le cabinet noir et l'alcôve. Tâche de retrouver cette petite boîte et de la mettre en lieu sûr pour me la rendre à mon retour ! J'y tiens extrêmement.

En pensant à ce petit cabinet, il m'est venu dans l'esprit que j'y avais porté le coffre où étaient tous mes papiers et, particulièrement, ces deux papiers relatifs à M. Ride et si importants,[418] qui se sont trouvés égarés au moment de mon départ. Il m'est donc venu l'idée qu'en choisissant et mettant en ordre les papiers que contenait ce coffre, j'ai peut-être laissé tomber dans ce cabinet noir, par exemple sous la table qui y est et sur laquelle était le coffre, les deux papiers égarés en question. Si M. Ride n'est pas encore à Paris quand tu recevras cette lettre, je te prie en grâce de chercher attentivement s'ils y seraient et, si tu les trouvais, de me l'écrire vite et de les mettre en lieu de sûreté pour me les rendre à mon retour. Je te prie de la même chose relativement à tous les papiers que j'aurais pu laisser dans la chambre d'Albine, excepté ceux qui sont dans le pupitre où il n'y a rien à toucher ; mais je voudrais que tu fisses mettre le pupitre dans une de tes anciennes chambres. Oh, si tu pouvais retrouver les deux papiers égarés dont je te parlais tout à l'heure, l'un relatif à la maladie de M. Ride, l'autre à l'arrangement que j'avais fait avec lui quand il revint de la Ferté-sous-Jouarre ! L'idée que je les aurais perdus me poursuit jour et nuit. Tous ceux à qui j'ai fait les amitiés, etc., dont tu m'avais chargé pour eux te comblent d'amitiés, ainsi qu'Alexis que j'ai été bien heureux de beaucoup voir[419] à Bourg.

Si tu m'écris tout de suite, adresse ta lettre au proviseur du Collège de Tournon (Ardèche), la semaine prochaine au proviseur du Collège royal d'Avignon (Vaucluse), la semaine d'après au proviseur du Collège royal de Nîmes (Gard) : dans tous les cas, pour remettre à M. Ampère, inspecteur général en tournée.

Je n'ai point de nouvelles d'Albine, ce qui m'inquiète horriblement. Si tu en sais, donne-m'en, ainsi que des yeux de ma pauvre sœur, pour qui je te charge de bien tendres amitiés, car elle est bien à plaindre. Mon tableau n'a pas trop pris sur M. Naudet, mais à merveille sur M. Gilibert, à qui je l'ai expliqué avec Bredin.

Ne m'oublie pas auprès de nos amis de Paris et de Mme Carron, Pignot, élisa, surtout de la famille de Jussieu. Si Albine est à Paris, remets-lui la lettre ci-jointe. Sinon, mets-y l'adresse ordinaire et envoie-là à Courtemot ! Fais bien attention de ne pas la mettre à la poste sans adresse ! Si elle est à Paris, dis-lui de m'écrire tout de suite au Collège de Tournon (Ardèche). Ton père t'embrasse mille fois de toute son âme. A. Ampère

Monsieur J-J Ampère rue des Fossés-Saint-Victor, n° 19, à Paris

Please cite as “L766,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 25 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L766