To Jean-Jacques Ampère (fils d'Ampère)   2 juin 1831

[379] Tournon 2 juin 1831

Je te remercie bien, mon cher fils, de la lettre que tu m'as écrite ; elle me tranquillise sur Albine, dont j'étais bien inquiet, ne sachant pas si elle était encore à Courtemot, ou bien à Paris, comme tu me l'apprends. Je vois aussi comment tu t'es arrangé. Puisque cela ne pouvait être autrement, il faut bien me résigner, en attendant que d'autres événements fassent naître d'autres arrangements et que je me retrouve avec toi. Nous nous verrons bien souvent et je sais bien que la rue du Bac convient mieux à toutes tes liaisons que celle des Fossés-Saint-Victor. Mais, cependant, la pensée de cette sorte de séparation m'a été bien dure. D'un autre côté, comment repousser d'auprès de moi ta malheureuse sœur dans l'affreuse position où elle se trouve ?

Tu as bien fait de porter dans ton nouveau domicile tout ce dont tu pouvais avoir besoin ; tu sais bien que tout ce qui est à moi est à toi. Je suis bien fâché que Ride se soit mêlé d'une chose qui ne le regardait pas ; mais,[380] dans l'état où est sa tête, il ne faut pas lui en vouloir. Nous sommes venus de Lyon ici en nous arrêtant trois jours à Vienne où il y a un collège communal que nous avons inspecté ; nous n'irons à Grenoble qu'en revenant de Marseille. Ainsi je ne verrai M. et Mme de Gasparin qu'à la fin du mois ou les premiers jours de juillet. Mais, dans trois jours, nous nous arrêterons quelques heures à Orange pour voir M. Auguste et Mme Laure et montrer à M. Naudet les antiquités d'Orange. Nous irons le même jour, dimanche prochain, coucher à Avignon.

A Vienne, je suis tombé de mon lit en dormant, ce qui m'a drôlement balafré la figure ; il n'en reste plus à présent que de faibles traces. Cela a été un grand bonheur pour mon rhume ; le repos forcé et dix sangsues au front ont été plus utiles encore à la poitrine[381] qu'à la tête qui aurait bien guéri sans cela. Je ne tousse presque plus. Les objections, qui n'étaient cependant que des doutes dans l'esprit de M. Gilibert, ont amené au tableau les dernières modifications qu'il recevra jamais. Pourvu que tu les approuves ! Il me tarde d'être à Paris pour te les dire. C'est précisément dans la partie que j'en croyais le moins susceptible en quittant Paris.

Je serai : à Avignon, dimanche 5 juin ; Nîmes, dimanche 12 ; Aix, dimanche 19 ; Marseille, jeudi 23. Tu peux m'y écrire jusqu'à ces époques partout où je reste huit jours, parce que ce temps est plus que suffisant pour que les lettres aient le temps d'arriver. Excepté à Aix, comme j'y reste moins, il ne faudrait m'y écrire que jusqu'au 15 juin. Après, à Marseille.

J'ai vu Alexis à Bourg et fait tes commissions. J'ai vu à Lyon toute la famille en bonne santé qui te comble d'amitiés, les Périsse, les Empaire, Francisque et sa femme, ainsi que Bredin et ses enfants. J'ai vu aussi M. et Mme de Jussieu,[382] Mme Morfeuillet, Mlle Morandy ; tout cela me parle de toi avec tout l'intérêt possible. M. Naudet aussi. Voilà faites les commissions dont je suis chargé pour toi. Ton papa t'aime et t'embrasse mille fois de tout son cœur. A. Ampère

Je reçois dans l'instant une lettre de ta sœur, qui a consulté M. Serres, avec un billet de M. Serres. Sa santé est inquiétante. M. Ride m'écrit aussi : en lui répondant, je lui dirai ce qu'il convient sur sa lubie au sujet des meubles.

Monsieur J-J Ampère rue du Bac, n° 10 bis, faubourg Saint-Germain, à Paris

Please cite as “L767,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 24 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L767