To ?   13 septembre 1834

[13 septembre 1834]
Monsieur le Vice-Président,

M. Ferrus 1, principal du collège de Perpignan, s'est présenté chez moi mardi dernier et m'a prié de vous écrire jusqu'à quel point je le croyais capable de diriger un collège où les mathématiques seraient considérées comme le but principal de l'instruction. Autant que j'ai pu en juger par les conversations que nous avons eues sur ce sujet et par ce que j'ai vu à Perpignan lorsque j'en ai examiné le collège il y a deux mois, M. Ferrus m'a paru entendre fort bien tout ce qui est relatif à cette partie de l'administration collégiale et avoir sur cette matière des idées très justes, quoi qu'il n'ait pas poussé fort loin l'étude des mathématiques à l'enseignement desquelles il s'était autrefois consacré, mais que d'autres occupations ne lui ont pas permis de cultiver depuis.

Grâce à la bonne distribution qu'il a faite des études dans le collège qu'il dirige, et au soin tout particulier qu'il a pris des classes de mathématiques, elles y sont sans contredit les plus fortes, et mieux organisées que dans les autres collèges communaux que j'ai inspectés, et même que dans plusieurs collèges royaux.

En résumé, je pense que M. Ferrus est un des hommes les plus propres à donner aux études mathématiques d'un collège une excellente direction et qu'il serait, par conséquent, convenablement placé à la tête d'un établissement particulièrement consacré. Son caractère et sa position sont d'ailleurs bien faits pour inspirer un vif intérêt, car il est la victime de son zèle et de sa confiance dans les promesses qu'on lui avait faites et qu'on ne paraît pas disposé à tenir quoiqu'on se loue beaucoup de lui à Perpignan.

Me permettez-vous, Monsieur le Vice-Président, de saisir cette occasion pour vous supplier, d'après l'intérêt que vous m'avez témoigné tant de fois, de vouloir bien m'accorder un moment d'audience pour vous faire hommage du premier volume de mon Essai sur la Philosophie des Sciences, qui est enfin terminé. Je sais que tous vos moments sont pris dans ce moment surtout, mais il ne s'agit que d'un instant, et cet instant est d'une bien grande importance pour moi, ayant à vous communiquer une chose à laquelle j'attache un bien grand intérêt.

Pensant que le dimanche est le jour où vous êtes le plus libre, j'aurai l'honneur de me présenter demain chez vous. Ma reconnaissance n'aurait point de bornes si vous daigniez accueillir ma prière.

Je suis avec respect, Monsieur le Vice-Président, votre très humble et très obéissant serviteur. A. Ampère Inspecteur général des études.

(2) Voir la note de la page 192 sur un M. de Férus qui est probablement sans rapport avec celui-là.

Please cite as “L811,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 25 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L811