To Jean-Jacques Ampère (fils d'Ampère)   21 mai 1835

[358] Roanne Samedi veille de la Pentecôte [21 mai 1835]

J'ai reçu ta lettre ce matin, mon cher fils, grâce à ce que M. Matter, me voyant hier si fatigué, est allé seul à Montbrison, et m'a donné rendez-vous à Saint-Etienne demain soir, afin que j'aie un jour et demi de complet repos ; déjà le jour est passé sans grande amélioration. Carron se portait bien jeudi à mon arrivée. Il voulait que j'allasse dîner le lendemain avec lui, M. Matter et moi. En arrivant nous le trouvâmes au lit d'un terrible accès de fièvre. Nous dînâmes avec ta tante. Aujourd'hui, j'ai été le voir, il n'a plus de fièvre, mais il redoute le retour pour demain.

Il est doublement important que tu concoures pour le prix dont je t'ai parlé, et que tu le remportes, ce qui ne peut manquer d'arriver dès que tu concoures. C'est d'abord l'honneur du prix et le prix lui-même ; c'est aussi d'empêcher qu'un quidam, en remportant le prix, se fit un rang dans une science qui doit tout entière t'appartenir. Tu comprends tout ce que ton oncle et ta tante m'ont dit pour toi. Dès que tu auras trouvé l'annonce du prix, je t'en supplie, écris-moi de suite que tu l'as retrouvée. Cela remplacera pour moi le tourment d'une inquiétude vague,[359] qu'on sait sans fondement et qui n'en fatigue pas moins, en une joie assurée et tranquille. Quand cette lettre arrivera à Paris, ce sera à Marseille, chez le proviseur, qu'il faudra m'écrire, et après à Grenoble. Il n'y a de proviseurs que dans les collèges royaux ; pour cette année, ce sont ceux de Marseille, Grenoble, Lyon et Dijon. Les autres collèges sont des collèges communaux et le chef s'appelle principal.

Ainsi, pour Roanne, c'était Monsieur le Principal du Collège de Roanne. Adieu, bien-aimé fils ; si ma fille est encore à Paris, embrasse-la bien tendrement pour moi. Si tu voyais ma sœur ou ma cousine, tu sais ce qu'il y aurait à leur dire ; mais Lenoir... c'est à lui surtout ! et Ballanche, si tu le vois, ne m'oublie pas ! Je te prie d'offrir l'hommage de mon profond respect à Mmes Récamier et Lenormant. Je t'embrasse du plus profond de mon cœur. A. Ampère

[360]Monsieur J-J Ampère, professeur de littérature au Collège de France à Beauséjour, près Passy, banlieue de Paris

Please cite as “L817,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 23 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L817