Je puis enfin vous annoncer que d'après ce que m'a dit ce matin M. Dumouchel, le rapport des bureaux sur les demandes de l'Académie de Genève est actuellement sous les yeux de son Excellence, et sera probablement bientôt discuté au conseil de l'Université. J'en parlerai à ceux des conseillers que je connais assez particulièrement pour cela. M. Roman ne manquera pas de m'aider ; vous savez quel souvenir il a emporté de Genève. J'ai à vous prier de me pardonner un oubli : je n'ai pas songé en vous écrivant dernièrement à la hâte à m'acquitter de ses commissions pour vous. Il m'avait chargé de vous offrir de sa part mille témoignages d'estime et d'amitié aussi vives que sincères, et de vous prier de le rappeler au souvenir de M. de Boissier et des autres membres de votre académie. Je voulais vous prier de la même chose pour mon propre compte, et si je ne l'ai pas fait je vous serai infiniment obligé de vouloir bien réparer un oubli que je me reproche bien vivement. Je regretterai toute ma vie le séjour trop court que j'ai fait à Genève, et l'impossibilité où je suis de cultiver comme je le désirerais la connaissance que j'ai eu l'avantage de faire avec les membres de votre académie.
Cher et respectable collègue, je vous prie de m'excuser si je ne vous ai pas écrit plus souvent au sujet de cette affaire ; j'attendais toujours de savoir quelque chose qui pût vous montrer que je n'avais rien négligé pour la faire réussir, mais vous savez quelles lenteurs ! Enfin voici un premier pas fait, et les motifs en faveur de l'Académie de Genève me paraissent, ainsi qu'à M. Roman, si puissants que je ne vois pas ce qui pourrait vous empêcher de réussir.
L'ouvrage de MM. Gay-Lussac et Thénard est prêt à paraître (1) * ; on tire dans ce moment les dernières feuilles. Tout y est assez bon, excepté le morceau sur l'acide oxymuriatique, où l'on trouve des objections dénuées de fondement contre le dernier mémoire de M. Davy 1 * ; elles sont au reste en très petit nombre, et il me semble même que dans l'une d'elles on suppose que M. Davy a avancé une chose dont je ne crois pas qu'il ait parlé, pour en prendre occasion de le combattre 2. Il y a d'ailleurs des choses excellentes dans cet ouvrage 3, beaucoup d'expériences de détail qui n'ont pas encore paru, et qui avec les recherches sur la pile de Volta 4 et les analyses de substances végétales et animales forment un bel ensemble de faits nouveaux 5.
Je vous prie, mon très cher et très honoré collègue, de présenter à Madame Pictet l'hommage de mon profond respect, et à Messieurs vos frères 6, ainsi qu'à Messieurs de Boissier, Prevost et Peschier celui de ma haute estime et de ma sincère amitié. Pour vous mon respectable collègue vous savez trop bien quels sentiments je vous ai voués pour la vie, pour que j'aie à vous les rappeler. Si vous me conservez votre amitié, tous mes vœux seront comblés. Agréez l'assurance de ces sentiments et tous les vœux que je forme pour votre bonheur et le succès de tout ce qui peut vous être agréable. A. Ampère
Please cite as “L883,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 25 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L883