To Marc-Auguste Pictet   3 mars 1811

Paris, 3 mars 1811
Très cher et très honoré collègue,

M. Roman m'avait chargé de vous offrir tous ses remerciements pour la bonté que vous avez eue de refaire les examens dont nous avions été chargés et dont les résultats ont été perdus avec le tableau de présentation que nous avions envoyé à S[on] E[xcellence] Je voulais y joindre les miens ; j'en devais également à Madame Pictet d'avoir bien voulu se souvenir de moi, et aussi pour l'aimable invitation qui termine votre lettre, et dont je prévois avec beaucoup de regret que je ne serai pas dans le cas de profiter, ne croyant pas devoir passer à Genève dans ma prochaine tournée. Les examens de l'école polytechnique à la fin du cours 1, et mille autre occupations ne m'ont pas laissé le temps de m'acquitter de ce devoir et maintenant je ne puis plus que vous prier de me pardonner cette faute involontaire ayant reçu une nouvelle lettre de vous à laquelle je m'empresse de répondre.

Il y aura mercredi prochain une séance de la commission des livres classiques ; je l'y porterai et je ne doute pas que la commission ne prenne à cet égard une détermination conforme à ce que vous désirez. A l'égard des affaires relatives à l'Académie de Genève, je ne sais plus que faire. Depuis qu'elles sont renvoyées à une commission j'en ai parlé à tous les membres du conseil avec lesquels j'ai des relations. Je n'en obtiens que des promesses qu'on s'en occupera, dont je ne vois point les effets. Je vous avoue, cher et respectable collègue, que je suis extrêmement fâché des lenteurs qui embarrassent cette affaire et tant d'autres. Au reste il paraît que si les affaires courantes restent en suspens c'est surtout parce qu'on s'occupe exclusivement d'objets plus importants par l'influence qu'ils doivent avoir sur l'université entière, et dont il est extrêmement urgent de s'occuper pour les comprendre dans le travail général que S[a] M[ajesté] a demandé au grand-maître et au conseil sur tout ce qui regarde l'université.

Je vous prie, mon cher et respectable collègue, de présenter à Madame Pictet l'hommage de mon profond respect, de me rappeler au souvenir de Messieurs Pictet, à celui de Messieurs de Boissier, Peschier, Prevost, L'Huillier, Vaucher 2, de tous les membres de l'Académie de Genève dont j'ai eu l'honneur de faire la connaissance. Daignez agréer l'hommage de cette tendre amitié mêlée de respect et de vénération que je vous ai vouée pour la vie, et qui me fait mettre au nombre des plus heureuses circonstances de ma vie celles qui nous ont rapprochés. A. Ampère

(1) Ampère enseignait les mathématiques à Polytechnique.
(2) Pierre Prevost (1751-1839) était professeur de physique générale, Simon-Antoine L'Huillier (1750-1840) professeur de mathématiques, et le botaniste Jean Pierre Vaucher (1763-1841) professeur d'histoire ecclésiastique à l'Académie de Genève.

Please cite as “L885,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 18 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L885