je vous remercie beaucoup et de votre aimable lettre et de toutes les marques d'amitié que vous m'y donnez. Je regrette bien vivement que nous n'allions pas à Genève cette année ; c'est la faute des Genevois, leur académie et leur collège vont trop bien pour que S[on] E[xcellence] juge nécessaire que les inspecteurs généraux les visitent chaque année. S'il m'était possible de faire à Genève un petit voyage avant l'arrivée de mes collègues pour avoir l'honneur de vous voir et tant d'autres personnes à qui j'ai voué la plus sincère estime et la plus vive amitié depuis que mon voyage de l'année dernière m'a procuré l'avantage de faire leur connaissance, ce serait pour moi un bien grand plaisir, mais les affaires qui m'ont amené ici avant eux ne me laissent pas même l'espoir de pouvoir exécuter un projet qui me procurerait une si douce satisfaction.
Votre lettre me donne deux bien bonnes nouvelles, celle de l'accroissement et du bonheur de votre intéressante famille, et celle que vous me donnez qu'on s'occupe enfin à l'université des affaires de votre académie. Les choses vont si lentement que malgré tout ce que j'avais pu dire aux conseillers que je connais avant mon départ, je craignais toujours que l'on laissât dormir dans quelque carton les papiers relatifs à vos demandes. J'espère à présent qu'on s'en occupera de suite, et j'écrirai à ce sujet demain à M. Rendu (1).
Je ferai vos commissions auprès de mes collègues dès qu'ils seront ici, mais je ne sais point encore l'époque de leur arrivée. J'ai passé quelques heures avec M. Degérando 1 au moment de mon départ. J'ai toujours trouvé en lui le meilleur des amis. Vous savez sans doute qu'une fièvre pernicieuse a porté l'effroi dans le cœur de ses amis, mais que le quinquina 2 à haute [dose] l'a mis presqu'aussitôt hors de danger. J'ai eu récemment de bonnes nouvelles de sa convalescence.
Je vous prie, mon cher et très honoré collègue, de présenter à Madame Pictet l'hommage de mon profond respect, de me rappeler au souvenir de Messieurs vos frères, de Messieurs Boissier, Peschier, Prevost, et de tous les membres de votre Académie. Je me suis procuré le livre de M. Bonstetten 3, mais je n'en ai point encore commencé la lecture 4. Je me rappellerai toujours le plaisir que j'ai goûté dans le dîner que nous avons fait ensemble aux Brotteaux avec M. Camille Jordan 5. Je vous prie, mon cher et très honoré collègue, d'agréer l'hommage de mon respect, de ma vive amitié, et de mon entier dévouement. A. Ampère
Please cite as “L886,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 25 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L886