From Claude-Julien Bredin   6 octobre 1818

6 octobre 1818

Je viens de voir que notre cher Camille est nommé président de l'Ain 1. Que le bon Dieu bénisse les travaux de cet homme de bien, qui emploie le beau talent que la nature lui a donné à la défense des doctrines humaines et généreuses ! Quel dommage que l'ordre politique soit un ordre faux ! Il y a, dans ce moment, un bel élan. On fait des efforts que j'admire pour atteindre à un but. Je suis plus content de l'esprit public que je ne l'étais. Je vois quelque chose de ce qu'il y a eu de bon dans les premiers élans de la Révolution. L'impulsion me paraît même plus épurée. Mais où est le but, où sont les bases ? L'ardeur politique est encore à naître. Ce serait, entre nous, la même discussion que pour le catholicisme, et je serais plus embarrassé encore. La doctrine politique vraie est cachée aux hommes du monde. Ils en sentent le besoin ; ils la cherchent ; les travaux auxquels ils se livrent pour la trouver produisent du bien et du mal, comme tout ce qu'ils font. La doctrine politique est une des branches de l'arbre de la Foi. Heureux ceux qui, comme l'ami dont je te parlais tout à l'heure, suivent en politique les lumières de la raison et les sentiments d'un cœur noble et aimant ! Leurs efforts ne seront pas perdus. Ils avancent le règne de la vérité ; peut-être même finiront-ils par recevoir le don de la foi ? [illeg]

(1) Camille Jordan, qui représentait l'Ain depuis 1815, avait été élu en 1818 à la fois dans le Rhône et dans l'Ain, mais avait opté pour l'Ain.

Please cite as “L918,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 27 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L918