From Gaspard de La Rive   13 mars 1821

Genève, ce 13 mars 1821
[76] Monsieur,

Je profite de la complaisance de M. de Saussure qui veut bien se charger de cette lettre pour vous remercier de l'envoi que vous avez eu la bonté de me faire et de tout le plaisir que m'a procuré votre admirable mémoire sur les phénomènes électromagnétiques. Vous avez expliqué de la manière la plus heureuse tous les phénomènes découverts par Œrsted et votre découverte des attractions et répulsions des courants suivant leur sens a servi de complément à ces faits et les a coordonnés d'une manière vraiment digne de la plus grande admiration. J'ai fait exécuter ici la plupart de vos appareils et ils ont tous répondu à mon attente et à celle des amateurs genevois [77] qui ont un grand plaisir à les voir fonctionner. Il serait maintenant à désirer de populariser un peu plus ces faits et de les mettre à la portée du plus grand nombre de Genevois. A cet effet et d'après l'idée qui m'en a été donnée par les aiguilles de Neef j'ai construit un petit flotteur composé de cuivre et de zinc que je prends la liberté de vous envoyer, petit instrument que tout le monde peut faire exécuter dans deux ou trois minutes et qui, mis sur de l'eau acidulée par un peu d'acide muriatique, démontre très bien la théorie des courants. En effet si le zinc est à droite et le cuivre à gauche et qu'on présente perpendiculairement au plan de l'ouverture le pôle boréal d'un aimant, il y a une forte répulsion ; si c'est le pôle austral, il y a attraction et l'ouverture de l'instrument entre et remonte le long de l'aimant.

Sur le même principe, j'ai construit un autre petit flotteur qui peut remplacer votre appareil fig. 3. pl. 2 que je prends aussi la liberté de vous envoyer, vous verrez qu'avec un fil de cuivre plié en hélice et fixé[78] par ses deux extrémités à deux petits morceaux de cuivre et de zinc placés dans un peu de liège on a avec de l'eau acidulée un aimant qui a ses deux pôles bien distincts ; le fil de cuivre doit être recouvert de soie afin de l'isoler d'avec ses extrémités qui reviennent par l'intérieur de l'hélice. Ce petit appareil que l'on peut construire dans quelques instants m'a fait grand plaisir. Le pôle austral ou le boréal sera du côté du cuivre ou du zinc suivant le sens de l'hélice.

Le Journal de Schweiger contient plusieurs appareils qui servent à augmenter tellement la force des courants qu'avec un seul élément zinc ou cuivre on peut faire dévier l'aiguille de 180°. J'aurais désiré vous en envoyer un ou deux, mais les ayant exécuté en cire ils sont trop fragiles pour soutenir le voyage. Vous en avez d'ailleurs probablement connaissance à l'heure qu'il est. Je compte les faire exécuter plus solidement et s'ils pouvaient vous être agréables ce serait pour moi un vrai plaisir que de vous les faire parvenir.

Veuillez, Monsieur, accepter de nouveau tous mes remerciements et me croire toujours, Monsieur, votre dévoué serviteur. G. de La Rive, Pr.

Please cite as “L951,” in Ɛpsilon: The André-Marie Ampère Collection accessed on 25 April 2024, https://epsilon.ac.uk/view/ampere/letters/L951