Arthur-Auguste De La Rive to Faraday   15 May 1840

<qr>Presinge(près Genéve) le 15 Mai | 1840

Mon cher Monsieur,

Je viens vous remercier de votre bonne & amiable lettre du 24 Avril1; je suis bien heureux que vos belles & savantes recherches vous aient conduit aux mêmes résultats que moi. Je suis bien impatient de lire votre mémoire2 & de l'imprimer dans la Bibl. Univ3. J'étais aussi sur le point de faire paraitre un travail sur le même sujet dans lequel, analysant les recherches de Marianini, de Fechner & autres, je montrais que leurs objections contre la théorie chimique n'étaient nullement fondées; votre dernier mémoire rendra ma besogne bien facile. Plus je vais en avant & plus je fais d'experiences sur ce sujet, plus je suis convaincu que les notions chimiques existent là souvent où on ne les soupconnait pas; ainsi qui aurait cru le platine oxidable même à l'air, & cependant c'est un fait indubitable; Berzelius lui-même à qui j'ai fait part de mes dernières experiences sur ce sujet en convient. - Par exemple, faites sécher après les avoir bien lavées dans les acides & dans l'eau distillée, deux lames de platine, l'une dans le vide, l'autre dans l'air ou dans l'oxigène, la première sera constamment positive par rapport à la seconde dans de l'eau acidulée. Ainsi encore faites passer le courant par induction à travers de l'eau acidulée (1/10 [word illegible] d'acide sulfurique) au moyen de deux fils de platine; vous verrez une poudre noire sur la surface de ces fils, poudre noire qui est du platine parfaitement métallique & qui a été réduit en poussière par l'oxidation & la réduction successives qu'a éprouvées chaque fil sur lequel le courant par induction amenait successivement de l'oxi‑gène & de l'hydrogène. Cette dernière experience peut se faire aussi avec des fils d'or, de palladium &c, s'aimant aussi, comme on devait s'y attendre, avec des fils de cuivre, d'argent &c; elle est très jolie; je désirerais bien que vous la répétassiez. L'appareil que Newman vous fit en 1834 pour produire les courans par induction au moyen d'un aimant est excellent pour produire ces effets4. II faut que les fils aient été bien lavés dans les acides avant l'opération & qu'ils soient très rapprochés l'un de l'autre (à 3 ou 4 lignes de distance seulement); il faut se servir d'acide sulfurique ou nitrique bien purs étendus de 9 fois leur volume d'eau. -

J'ai fait dernièrement plusieurs expériences assez intéressantes avec ces courans d'induction en me servant de métaux différens, pour les transmettre dans les solutions acides. En voici une qui est bien favorable à la théorie chimique de l'électricité voltaïque. - Je plonge dans de l'eau acidulée un couple formé d'un fil de platine & d'un fil de plomb ou de tout autre métal oxidable, placés chacun à l'une des extrémités d'un galvanometre, j'ai un courant très faible; je fais passer les courans par induction, allant alternativement en sens contraire, du fil de plomb qui fait partie du couple à un fil de platine plongé dans le liquide qui n'est pas le même que celui qui est lié metalliquement sur le fil de plomb les courans par induction amènent alternativement sur le fil de plomb de l'oxigène & de l'hydrogène; or ce fil ne garde que l'oxigène qui l'oxide; cette oxidation donne lieu à un fort courant qui transporte l'hydrogène sur le fil de platine qui forme un couple avec le plomb. - Or où est ici la source du courant si ce n'est dans l'oxidation du plomb opérée de la manière la plus directe par l'arrivée de l'oxigène sur ce métal. Si c'est le contact qui donne lieu à ce courant, pourquoi n'existait-il qu'à un infiniment faible degré avant que l'oxigène arrivât sur la surface du plomb. Il y a dans ce phénomène & d'autres analogues plusieurs détails assez curieux que je ne vous donne pas de peur de vous en ennuyer, mais que vous trouverez dans mon mémoire5 que je compte vous envoyer en vous demandant, si vous le jugez convenable, d'avoir la bonté de le présenter à la Société Royale.-

Les recherches de Mr Schoënbein sur l'odeur qui accompagne certains effets électriques me paraissent curieuses6, mais je n'admets pas, encore du moins, son explication. J'ai souvent observé le phénomène, & je le crois du à quelques particules très subtiles, détachées soit du métal qui sert d'électrode, soit de la solution décomposée; je suis plutôt disposé à croire que c'est un effet l'oxida‑tion légère qu'eprouvait au pole positif, même les métaux les moins oxidables, particules qui oxidées se détachent du reste du métal & surtout à cause de leur extrême ténuité, en suspension dans le gaz. Peut-être aussi reste-t-il un peu d'arsenic dans le métal qui donne lieu à cette odeur.

Je vous ai envoyé par Mr Prevost ma petite notice sur un procédé électro‑-chimique de dorage7; j'espère que vous l'avez reçue. Dès lors j'ai encore perfectionné mon procédé & il est à présent employé en grand à Genève. Indepén‑damment de l'avantage qu'il présente pour la santé par l'absence du mercure, il a l'avantage d'être beaucoup plus économique que le procédé par amalgama‑tion (plus du 2/3). Indépendamment de l'argent & du laiton nous avons réussi à dorer l'acier & même l'argental. - Le point le plus important c'est que la surface à dorer soit parfaitement propre; la moindre tache de graisse ou d'oxidation empêche complètement l'opération de réussir. L'emploi de l'hydro‑gène dégagé sur la surface à nettoyer par son immersion dans l'eau acidulée avec un petit morceau de zinc qui lui est uni métalliquement, réussit très bien. - Il faut aussi que le métal ait une composition & une structure bien uniforme; Ainsi l'argent allié avec du cuivre, si l'alliage n'est pas conforme, c. à d. s'il y a des portions qui présentent plus de cuivre que d'autres se dore mal & inégale‑ment. Il s'opère un effet électrochimique entre les différentes parties du même métal qui dérange complètement l'opération. - Je désirerais vivement que vous fassiez quelques essais; avec votre dextérité & habileté ordinaire vous verrez bientôt en quoi le procédé peut être perfectionné. - Je suis à chercher une bonne occasion pour vous envoyer quelques objets dorés par mon procédé, que j 'ai là & qui vous sont destinés; j'espère que vous les receverez incessamment & que vous en serez content.

Ne croyez-vous pas qu'on pourrait mettre une petite notice sur ce sujet dans un journal Anglais, par exemple dans l'Athenaeum et ne pourriez-vous pas avoir la bonté d'en dire ou d'en faire dire quelques mots par un autre, si votre temps ne vous permet pas de faire vous même (ce qui me serait bien plus agréable) un article de quelques lignes sur ce sujet. Vous pourriez peut-être y joindre quelques mots sur mes expériences relatives à l'oxidation des fils de platine & aux effets divers dont je vous parle des courans par induction.

Vous me faites espérer que vous allez prendre les expériences sur l'électricité statique developpée par le contact des métaux; je vous en supplie examinez avec attention ce point comme vous avez examiné les autres & vous arriverez, j'en suis sûr, à la même conséquence savoir que le contact seul & par lui-même n'est nullement une source d'électricité. Je me suis servi dans toutes mes recherches d'un électroscope à feuilles d'or sans piles sèches (Gardez-vous en, c'est une source d'erreur), aussi d'un condensatetur de laiton doré de 9 pouces de diamètre environ. - J'avais soin de tenir l'intérieur de l'électroscope bien desséché avec du chlorure de calcium.- J'ai sur ce sujet [word obliterated] grand nombre d'expériences non encore publiées que j'ai faites avec cet appareil & qui toutes conduisent au même résultat.

Enfin pour terminer cette longue lettre, je vous dirai que la lecture du mémoire de Mr Regnault8 sur les chaleurs spécifiques 9 nous a décidés Marcet10 & moi à publier, sans tarder, les recherches que nous avons deja faites sur ce sujet sur les solides, les liquides, & les gaz 11. Notre procédé fondé sur les lois de refroidissement nous a donné des résultats qui accordent assez bien avec la loi de Dulong & Petit12. - Quant aux gaz nous avons continué à trouver pour les gaz simples & notamment pour l'hydrogène, exactement la même chaleur spécifique que pour l'air; mais il est des gaz composés qui n'ont pas sous le même volume & la même pression la même chaleur spécifique que les gaz simples; ainsi nous avons trouvé pour le gaz oléfiant (hydrogène bicarboré). 1,451° & pour le gaz acide carbonique 1,210 l'air était 1. - Nous avons obtenu les résultats suivants pour des sub‑stances dont la chaleur spécifique n'avait pas encore été obtenue. Selenium 0,08240, Cadmium 0,05766, Tungstène 0,1306, Molybdène, 0,06596 Cobalt 0,1172 au lieu de 0,1498 qu'avaient trouvé Dulong & Petit, probablement parce qu'ils faisaient usage de cobalt réduit par le charbon & qui en contenait encore un peu, tandisque nous nous servis [sic] de cobalt réduit par l'hydrogène.-

Mais voilà une lettre assez longue.- Ne voudrez vous point nous voir cet été en Suisse. Un voyage sur le Continent vous reposerait & vous ferait du bien. - Nous avons à Presinge des chambres toutes prêtes pour vous recevoir vous & Madame Faraday. - Venez profitez en & croyez moi toujours votre tout dévoué & bien affectionné. | A. de la Rive


Address: Mr Faraday | Royal Institution | Albemarle Street | London

TRANSLATION<qr>Presinge (near Geneva) 15 May 1840.

My Dear Sir,

I am writing to thank you for your good and kind letter of 24 April13. I am very pleased that your beautiful and wise research has lead you to the same results as me. I am very impatient to read your paper14 and to print it in the Bibl. Univ15. I was also on the point of publishing a work on the same subject in which, by analysing the research of Marianini, Fechner and others, I showed that their objections against the chemical theory were without foundation; your last paper will make my work very easy. The more I go forward and the more I experiment on this subject, the more I am convinced that chemical notions exist in places where no one suspected; thus who would have thought that platinum could oxidise even in the air, and yet this is an indisputable fact; Berzelius himself, whom I included in my last experiments, is in agreement on this subject. For example, after giving two platinum strips a good wash in acids and in distilled water, dry one in a vacuum, the other in air or in oxygen, the first will always be positive in comparison with the second in slightly acidic water. Then pass an induced current through the slightly acidic water (1/10 [word illegible] of sulphuric acid) by means of two platinum wires; you will see a black powder on the surface of these wires, a black powder which is perfectly metallic platinum and which has been reduced to a powder by the oxidisation and successive reductions that have been experienced by each wire on which the induced current brought successively oxygen and hydrogen. This last experiment can also be done with gold or palladium wires etc., [and] as one would expect, with copper and silver wires etc.; it is quite fun; I would very much like you to repeat it. The apparatus that Newman made for you in 1834 to produce currents by induction by means of a magnet is excellent for producing these effects16. The wires must be washed thoroughly in the acids before the operation and they must be placed close to one another (at 3 or 4 lines distance only); you must use very pure sulphuric or nitric acids diluted with 9 times their volume of water.

I have recently done several quite interesting experiments with these induced currents using different metals to transmit them through acidic solutions. Here is one that is very favourable to the chemical theory of voltaic electricity. I plunge into slightly acidic water a couple made of a platinum wire and a lead wire or any other metal liable to oxidise, each placed at one end of the galvanometer, and I have a very weak current; I pass through induced currents, going alternately in the opposite direction, from the lead wire that is part of the couple to a platinum wire plunged in the liquid which is not the same as the one which is metallically joined to the lead wire, the induced currents bring alternately onto the lead wire some oxygen and hydrogen; now this wire keeps only the oxygen which oxidises it; this oxidisation causes a strong current which takes the hydrogen onto the platinum wire, which forms a couple with the lead. Now, where is the source of the current if it is not in the oxidisation of the lead caused in the most direct manner by the arrival of the oxygen on this metal? If it is the contact which causes this current, why did it not exist except in an infinitely weak degree before the oxygen arrived on the surface of the lead? There are in this phenomenon and other analogous ones, several quite interesting details that I shall not mention for fear of boring you, but which you will find in the paper17 I hope to send to you, with a request that if you think it appropriate, to have the kindness to present it to the Royal Society.

The research of Mr Schoenbein on the odour that accompanies certain electric effects seems curious to me18, but I do not accept, at least not yet, his explanation. I have often observed this phenomenon and I believe it to be due to some very tiny particles, detached either from the metal which serves as the electrode or from the decomposed solution; I am more inclined to believe that this is an effect of slight oxidisation that was felt at the positive pole, even in less oxidisible metals, particles which, once oxidised, detach themselves from the rest of the metal, above all because of their extreme fineness, and are suspended in gas. Perhaps also there might be a little arsenic in the metal which causes the odour.

I sent you via Mr Prevost my little note on an electro-chemical plating process19: I hope you have received it. Since then I have perfected my procedure further and it is currently widely used in Geneva. Independent of the health advantage due to the absence of mercury, it has the advantage of being much more economic than the procedure by amalgamation (more than 2/3). Apart from silver and brass, we have managed to plate steel and silver plate. The most important point is that the surface to be plated should be perfectly clean; the least stain of grease or oxidisation completely prevents the operation from succeeding. The use of clear hydrogen on the surface to be cleaned by immersion in slightly acidic water with a tiny piece of zinc that is joined to it metallically, succeeds very well. The metal must also have a very uniform composition and structure. Thus a silver/copper alloy, if the alloy is not even, that is to say, if there are portions which have more copper than others, plates badly and unevenly. An electro-chemical effect takes place between the different parts of the same metal which completely upsets the operation. I would very much like you to try it out; with your dexterity and usual skill, you will soon see how the operation can be perfected. I am looking for an appropriate occasion to send you some objects plated by my procedure, which I have here and which are destined for you; I hope you will receive them soon and that you will be pleased with them.

Do you not think that a small note on this subject could be put in an English journal, for example, in the Athenaeum and would you have the kindness to say a few words or to ask someone else, if you time does not permit you to do it yourself (which would be far more pleasing to me) to write an article of a few lines on this subject? You could perhaps join a few words on my experiments relating to the oxidisation of platinum wires and different effects which I have mentioned of induced currents.

You make me hope that you are going to undertake experiments on static electricity developed by the contact of metals; I beg you to examine this point as carefully as you have examined others and you will arrive, I am sure of it, at the same conclusion, that is that the contact alone on its own is in no way a source of electricity. I used in all my research a gold-leaf electroscope without dry piles (be wary, as it is a source of error), also a gilded brass condenser approximately 9 inches in diameter. I was careful to keep the electroscope very dry with calcium chloride. I have on this subject a great number of unpublished experiments which I did with this apparatus and which all lead to the same result.

Lastly, to conclude this long letter, I shall tell you that the reading of Mr Regnault's20 paper on specific heats 21 spurred Marcet22 and myself to publish without delay the research on solids, liquids and gases that we have already done in this field23. Our procedure, founded on the laws of cooling, has given us results which accord quite well with the law of Dulong and Petit24. As for gases, we have continued to find for gaseous elements and notably for hydrogen, exactly the same specific heat as for air; but it is composite gases which do not have, under the same volume and the same pressure, the same specific heat as simple gases; this is what we have found for olifiant gas (bicarborate of hydrogen): 1,451° and for carbonic acid 1,210 the air was 1. We obtained the following results for substances for which the specific heat had not yet been obtained: Selenium 0,08240, Cadmium 0,05766, Tungsten 0,1306, Molybium 0,06594, Cobalt 0,1172 instead of 0,1498 that Dulong and Petit had found, probably because they used cobalt reduced by coal and which still contained some of it whilst we used cobalt reduced by hydrogen.

But this letter is long enough. Would you like to come and see us this summer in Switzerland? A tour of the Continent would refresh you and do you good. We have at Presinge rooms ready to receive you and Mrs Faraday. Come and take advantage of them and believe me always your very devoted and most affectionate | A de La Rive.

Faraday (1840a, b), ERE16 and 17.
Faraday (1841), ERE16 and 17.
See letter 695.
De La Rive, A.-A. (1841).
See letter 1259 and Proc.Roy.Soc., 1840, 4: 226.
De La Rive, A.-A. (1840).
Henri Victor Regnault (1810-1878, DSB). Professor of Chemistry at the Ecole Polytechnique.
Regnault (1840).
François Marcet (1803-1883, Ann.Reg., 1883: 142). Anglo-Swiss man of science.
De La Rive and Marcet (1840).
Alexis Thérèse Petit (1791-1820, DSB). French physicist.
Faraday (1840a, b), ERE16 and 17.
Faraday (1841), ERE16 and 17.
See letter 695.
De La Rive, A.-A. (1841).
See letter 1259 and Proc.Roy.Soc., 1840, 4: 226.
De La Rive, A.-A. (1840).
Henri Victor Regnault (1810-1878, DSB). Professor of Chemistry at the Ecole Polytechnique.
Regnault (1840).
François Marcet (1803-1883, Ann.Reg., 1883: 142). Anglo-Swiss man of science.
De La Rive and Marcet (1840).
Alexis Thérèse Petit (1791-1820, DSB). French physicist.

Bibliography

FARADAY, Michael (1841): “De l'origine du pouvoir de la pile voltaïque, seizième [et dix septième] série des recherches expérimentales sur l'électricité”, Arch. Elec., 1: 93-136, 342-400.

REGNAULT, Henri Victor (1840): “Recherches sur la chaleur spécifique des corps simples et composés”, Ann. Chim., 73: 5-72.

Please cite as “Faraday1277,” in Ɛpsilon: The Michael Faraday Collection accessed on 1 May 2024, https://epsilon.ac.uk/view/faraday/letters/Faraday1277